Les fiches techniques

Fiche n°7 : Le modèle "Advanced" donne de nouvelles dimensions au calcul du coût du capital

Si le principe du calcul actuariel du TRI et celui de la rémunération du risque au travers d'une prime sont communément admis, il n'y a d'unanimité ni sur la construction théorique du taux de rentabilité exigible par un investisseur ni sur la valeur des paramètres qui le composent. Fairness Finance propose une approche innovante et compatible avec le MEDAF permettant d'évaluer près de 100 % des sociétés en s'affranchissant des paramètres moyens de marché si le profil de risque spécifique de la société s'en éloigne sensiblement.

Les données du problème : les approches classiques sont dépassées

Si le principe du calcul actuariel du TRI (qui permet l'équivalence entre un flux futur et sa valeur présente) et celui de la rémunération du risque au travers d'une prime (par rapport au taux sans risque) sont communément admis, il n'y a d'unanimité ni sur la construction théorique du taux de rentabilité exigible par un investisseur ni sur la valeur des paramètres qui le composent[1]… Et pourtant la planète financière tourne et il n'y a peut-être pas si loin à chercher pour réconcilier marchés et théorie… à condition de poser quelques principes de bon sens.
 
  • Les prévisions du marché ne sont pas des espérances au sens mathématique
Ne demandez pas à un manager de prévoir la faillite de son entreprise ni la restitution à ses clients de l'essentiel des gains de productivité qu'il attend de son prochain investissement… Ainsi les prévisions sont-elles en moyenne trop optimistes.
Tout d'abord, elles ne tiennent pas compte de la probabilité de faillite de l'entreprise, alors que la sélection qui s'opère dans une économie ouverte à la concurrence est tout aussi féroce que celle décrite par Charles Darwin dans la nature. Le Modèle d'équilibre des actifs financiers, (MEDAF) qui repose sur des espérances mathématiques ne s'applique pas ici à des prévisions financières non probabilisées du risque de défaut…
Par ailleurs, quand bien même une entreprise aura-t-elle survécu à l'horizon de 3 à 5 ans, il est probable qu'elle n'aura pas délivré les performances initialement attendues dans son plan d'affaires initial, ni dans les prévisions des analystes établies 3 à 5 ans auparavant. Ainsi lorsque l'on compare les prévisions financières des analystes concernant les sociétés cotées à leurs réalisations effectives, on observe que la surestimation des prévisions est d'autant plus grande que l'horizon de prévision est éloigné[2]
 
 
  • Des primes non théorisées sont empiriquement constatées
Le modèle d'équilibre des actifs financiers n'a pas prévu une prime de risque additionnelle pour rémunérer le manque de liquidité. Pourtant, un tel phénomène existe et équivaut à un effet taille en défaveur des entreprises dont la capitalisation est inférieure à 2,7 Md€ en Europe et à 1 Md$ aux USA. En deçà de ces seuils, le coût implicite du capital des sociétés fait ressortir une prime de risque résiduelle qui ne s'explique ni par le risque de faillite, ni par l'excès d'optimisme des prévisions. Cette prime s'explique probablement par le risque de fourchette bid/ask de cotation, ainsi que par le coût incompressible de la gestion et de l'investissement.
Enfin, si l'on observe par rapport aux emprunts d'État une prime de risque additionnelle offerte par les rendements obligataires des entreprises notées AAA (c'est-à-dire dont le risque de faillite et le risque systématique sont négligeables), il y a lieu de penser qu'une telle prime est également requise pour la rentabilité des actions des sociétés cotées.

La solution proposée par Fairness Finance

Le modèle Fairness Finance intègre ces résultats en se basant sur des prévisions de cash flows de près de 4 000 entreprises cotées en Europe et en Amérique du Nord et sur plus de 10 000 obligations cotées. C'est un modèle prospectif basé sur des prévisions.
Ainsi le taux de rendement interne du marché (TRI) qui fonde le calcul, garantit que les taux actuariels qui découlent du modèle conduisent bien à des valeurs de marché. Cette approche s'oppose à celles fondées sur des primes de risque historiques calculées sur des périodes comprises entre 70 ans et 100 ans et qui ont tout lieu de conduire à des valeurs hors marché, les investisseurs n'ayant pas le loisir de disposer d'horizons d'investissement aussi longs !
 
Cette solution se décline en deux approches :
  • la première, « Mainstream », réponds aux besoins de base des évaluateurs, avec notamment la prime de risque de taille ;
  • la seconde, « Advanced », fournit les outils pour calculer des primes de risques spécifiques au profil de la société évaluée, ainsi que pour estimer le coût de la dette, en cohérence avec le risque de défaut pris en compte dans le coût des fonds propres.

L'approche de base, « Mainstream »

Cette approche permet d'évaluer la majeure partie des sociétés à partir des paramètres moyens de marché.  Le calcul du coût des fonds propres de la société, « ke.i », s'établit ainsi :
 
 
 
Avec :
  •   βL.i : le bêta avec levier financier de la société (les bêtas de 24 secteurs GICS de niveau 2 et de 68 secteurs de niveau 3 sont disponibles sur le site par abonnement);
  •   ΠR : la prime de risque du marché au sens du MEDAF, i.e. celle à laquelle s'applique le bêta (disponible sur le site par abonnement) ;
  •   ΔΠ: la prime moyenne corrigeant les biais d'optimisme et de non prise en compte du risque de défaut dans les prévisions des grandes sociétés (Large caps) ;
  •   ΠT.l : la prime de taille moyenne des sociétés de capitalisation boursière identique à la valeur de marché des capitaux propres de la société évaluée (par le DCF). Cette prime est accessible sur le site, par abonnement. Elle incorpore les surcroîts moyens de primes de risques des Small caps par rapport au Large caps au titre du risque de défaut et du biais d'optimisme, ainsi qu'une prime de liquidité ;
  •  rf : il correspond au rendement à taux fixe d'un panier d'emprunts in fine d'états notés au moins AA en Europe ou à celui du T-Bond 10 ans pour l'Amérique du Nord (disponibles sur le site).
 
L'avantage de cette approche est sa simplicité. Elle suppose que le biais lié à l'absence de prise en compte du risque de défaut et celui provenant de l'excès d'optimisme des plans d'affaires sont « dans la moyenne », compte tenu de la taille de la Société à évaluer.
 
Cette hypothèse de convergence à la moyenne est généralement celle retenue dans les tests de dépréciation (impairment) des unités génératrices de valeur, requis par la norme comptable IAS 36.

L'approche « développée » ou « Advanced », pour sortir des sentiers battus

 
Dans l'abonnement "Advanced", les données fournies par Fairness Finance[3] permettent d'évaluer près de 100 % des sociétés en s'affranchissant des paramètres moyens de marché si le profil de risque spécifique de la société s'en éloigne sensiblement :
 
 
Avec :
  •  βL.i : le bêta avec levier financier de la société (les bêtas de 24 secteurs GICS de niveau 2 et 68 sous-secteurs de niveau 3 sont disponibles par abonnement) ;
  •  ΠR : la prime de risque du marché au sens du MEDAF, i.e. celle à laquelle s'applique le bêta (prime fournie par abonnement) ;
  •  Πd.i : La prime de risque pour corriger l'absence de prise en compte de la probabilité de faillite de l'entreprise dans son plan d'affaires. Cette prime se déduit du spread de crédit modélisé à partir de l'outil fourni par abonnement ;
  •  Πo.i : la prime de risque pour corriger le biais d'optimisme des prévisions en cas de survie de la société. Elle peut se déduire par exemple de l'écart moyen constaté entre les prévisions des plans d'affaires passés et les performances réelles de la société. La prime observée en moyenne est fournie par abonnement ainsi que la méthodologie pour la recalculer si besoin ;
  •  ΠL.i : la prime de liquidité résiduelle moyenne des sociétés de capitalisation boursière identique à la valeur de marché des capitaux propres de la société évaluée (par le DCF). Cette prime correspond à l'écart résiduel du coût implicite du capital, qui ne s'explique ni par le surcroît de risque de défaut, ni par le biais d'optimisme des Small caps. La formule de calcul de cette prime est fournie sur abonnement ;
  • ΠA : la part résiduelle de la prime obligataire corporate AAA qui ne s'explique ni par le risque de défaut, ni par le risque systématique, ni par le manque de liquidité. Elle est la prime incompressible marquant le passage des risques souverains aux risques privés les mieux notés ;
  • rf : le taux sans risque. Il correspond au rendement à taux fixe d'un panier d'emprunts in fine d'états notés au moins AA en Europe ou à celui du T-Bond 10 ans pour l'Amérique du Nord (disponibles sur le site). 
 
Cette approche permet ainsi de rationaliser une prime spécifique, notamment pour des sociétés de type « startup » ou « biotech » qui présentent un aléa de prévision important et des points d'étape structurants pour leurs chances de succès. Inversement, elle rend possible l'évaluation des entreprises en difficulté. Accessoirement, le modèle permet d'assurer la cohérence entre le coût des fonds propres et celui de la dette en retenant des hypothèses communes sur le risque de crédit.
 
En d'autres termes, le travail d'évaluation cesse ici d'être un exercice quasi-mécanique de benchmark conduisant à une valeur « comme si » l'entreprise évaluée était dans la moyenne, ou susceptible d'y retourner par l'opération conjointe de la conjoncture ou d'un éventuel repreneur !
 
Elle permet ainsi de s'affranchir des situations moyennes, sans recourir non plus à la sempiternelle prime de « risque spécifique » de 3 % sortie de nulle part, encore trop souvent rencontrée, et qui tend à décrédibiliser même les travaux d'évaluation les plus aboutis…
 
Dans cette approche, le bêta, si souvent décrié cesse d'être l'enjeu. On notera néanmoins que Fairness Finance fournit des bêtas sectoriels calculés à partir de portefeuille diversifié, donc relativement stables. Libre à l'évaluateur de calculer le bêta moyen de son échantillon de comparables.
 
Le véritable enjeu en effet se situera plutôt au niveau du biais d'optimisme et du risque de défaut.
  • La prime d'optimisme permet de tenir compte dans la valeur de la surévaluation des prévisions sans avoir à les corriger à la baisse ;
  • On démontre par ailleurs[4] que la prime de défaut dont il faut tenir compte dans le coût des fonds propres pour actualiser des cash flows non probabilisés n'est pas loin d'être égale à la probabilité cumulée de défaut (D) rapportée à l'horizon d'investissement (T) :
 
En d'autres termes, si une entreprise présente à 5 ans un risque de faillite de 50 %, elle se verra appliquer en moyenne une prime de risque de défaut de 10 % à son coût des fonds propres dans la mesure où l'actionnaire perd généralement la totalité de son investissement en cas de faillite.
 
 
La probabilité de défaut peut être tirée de statistiques passées mais aussi des spreads de marché, ce qui est préférable pour tenir compte des conditions de marché prévalant à la date de calcul. Pour ce faire, les outils développés par Fairness Finance permettent de modéliser la notation d'une société à la date de son évaluation et ensuite d'en déduire la probabilité de défaut implicite, sur la base des spreads de marché observés en fonction de la notation.

L'approche « Advanced » et le coût de la dette

L'approche Advanced permet par ailleurs d'estimer le coût de la dette à taux fixe in fine de la société évaluée, en fonction de la durée de l'emprunt, de la taille et la notation de crédit. Cette dernière peut également être estimée à partir d'un modèle mis à disposition par abonnement.
 
Ces modèles sont basés sur les rendements de plus de 10 000 obligations corporate cotées et sur des régressions multiples prenant en compte des données de marché ainsi que des données comptables relatives aux émetteurs de titres obligataires. 
 
Cette approche permet ainsi d'obtenir le coût de la dette d'une société,  , i.e. le taux auquel la dette serait refinancée à une date donnée. Si besoin, elle fournit également sa composition :
 
 
Avec :
  •  βd.l : le bêta moyen des obligations de même notation que la société en fonction de la durée des emprunts (modèle fourni sur abonnement) ;
  •  ΠR : la prime de risque du marché au sens du MEDAF, i.e. celle à laquelle s'applique le bêta (prime fournie par abonnement) ;
  •  Πd.i : La prime de risque pour corriger le coût contractuel de la dette de la probabilité de faillite et de la perte qui s'ensuit ;
  •  ΠLd.i : la prime de liquidité résiduelle moyenne des emprunts obligataires des sociétés de capitalisation boursière identique à la valeur de marché des capitaux propres de la société évaluée (par le DCF) et intégrant également la taille de la souche ;
  • ΠA : la part résiduelle de la prime obligataire corporate AAA qui ne s'explique ni par le risque de défaut, ni par le risque systématique, ni par le manque de liquidité. Elle est la prime incompressible marquant le passage des risques souverains aux risques privés les mieux notés ;
  • rf : le taux sans risque. Il correspond au rendement à taux fixe d'un panier d'emprunts in fine d'états notés au moins AA en Europe ou à celui du T-Bond 10 ans pour l'Amérique du Nord (disponibles sur le site). 
Les outils d'estimation du coût de la dette partagent avec ceux utilisés pour le coût des fonds propres des concepts communs sur la rémunération du risque systématique (droite de marché des actifs risqués) et sur l'ajustement des flux attendus en cas de survie (probabilisation de la perte en cas de défaut). Ces approches sont empiriques et croissent des données de marché (cours, volatilité) avec des paramètres comptables passés et prévisionnels. Ces données assurent la cohérence de l'évaluation du coût moyen pondéré du capital, en basant le coût des fonds propres et celui de la dette sur des hypothèses communes (volatilité, effet taille, risque financier…) qui se traduisent par la prise en compte d'une même note de crédit.
 
Il convient de signaler que le coût de refinancement estimé à partir des outils développés par Fairness Finance correspond à la définition du coût d'endettement retenu par la norme IFRS 16 pour le calcul du l'actif de droit d'usage et du passif correspondant aux engagements de paiement de loyers opérationnels.

L'approche « Advanced » : une nouvelle dimension pour l'évaluation et l'investissement

Gageons qu'avec ces outils de nouvelle génération, l'évaluateur pourra enfin reprendre la main sur ses travaux d'évaluation en apportant de la valeur ajoutée là où il est réellement attendu : l'appréciation du risque du plan d'affaires et du positionnement stratégique de l'entreprise.
 
Ce modèle apporte par ailleurs une information nouvelle à l'investisseur : l'anticipation de rentabilité des marchés d'actions et d'obligations.
 
En effet, une fois que le TRI issu des prévisions de cash flows est « dépollué » des primes correctrices pour biais d'optimisme et pour absence de prise en compte du risque de défaut (calculées pour les seuls besoins de l'actualisation), alors il reste un coût d'opportunité pour l'investisseur, qui est égal à l'espérance de rentabilité d'une action. Après correction des biais systématiques, et grâce à la loi des grands nombres, ces données agrégées conduisent à l'estimation de la rentabilité anticipée des marchés d'actions. Connaissant la prime de risque du marché et les bêtas des et les spreads de défaut obligataires on en déduit également l'espérance de rendement du marché des obligations.
 
Ces données financières globales peuvent s'avérer être des indicateurs de retournement de marché, même si elles doivent être interprétées avec précaution en les resituant dans un faisceau de présomptions. Ainsi, selon le modèle Fairness Finance, quand les marchés n'offrent plus une rémunération suffisante par rapport au taux sans risque et à l'inflation anticipée, alors une correction généralement violente est à prévoir.
 
Pour mener ce type d'analyse, s'agissant de la zone Euro et du marché français, nos abonnés à l'année à la formule « Advanced » disposent d'un historique de l'espérance de rendement implicite du marché (prime MEDAF, prime AAA et taux sans risque) remontant jusqu'à fin 2006. Ces données pourront être mises à profit pour apprécier l'état d'avancement du cycle économique et boursier.
 
 
 

 
[1] "A Look Back at Modern Finance: Accomplishments and Limitations", Journal of applied Corporate finance, Vol.28, Issue 4, pp.10-16, 2016, at SSRN: https://ssrn.com/abstract=2902370
[2] Par exemple, pour l'erreur de prévision de résultat par action observée sur un horizon de 25 mois en moyenne pour les sociétés comprises dans l'indice S&P 500, voir Yardeni, « Predicting the Markets: A Professional Autobiography », §13 Predicting Corporate earnings, page 413 et suivantes, et tables accessibles à : https://www.yardenibook.com/fr/ptmcctchap13earnings.pdf
[3]  Ces données sont actuellement communicables par envois mensuels sous forme de fichiers Excel permettant la mise en œuvre de calculs de WACC itératifs, ainsi que sous PowerBi pour une visualisation rapide.
[4] Clère, Roland and Marande, Stéphane, « Risque De Défaut Et Valeur Des Actions: Grand Oublié Ou Révolution Culturelle? », (November 6, 2017). Available at SSRN: https://ssrn.com/abstract=3065948
>